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Communiqué


Au lendemain de la journée internationale des droits de l'enfant

A QUAND LE RESPECT DES DROITS
DES ENFANTS AUTISTES A GENEVE?


La Convention des Droits de l’Enfant (CDE)1 a été adoptée par l’ONU en 1989. Pour la première fois dans l’histoire, l’enfant devient sujet de droit et son intérêt supérieur doit primer.

La Suisse a ratifié la CDE en 1997.

Qu’en est-il aujourd’hui du respect de cette convention internationale à Genève ? Faisons le point sur la situation qui concerne les enfants autistes.

➔ Discrimination (art. 2) :

A Genève, la discrimination s’opère dès la détection de la différence de l’enfant qui peut intervenir dans différents environnements, allant des structures d’accueil de la petite enfance à l’école ordinaire. La prise en charge par les services de l’Etat de cette détection a comme conséquence de séparer l’enfant du milieu éducatif ordinaire et du milieu social de ses pairs.
Ceci a des conséquences graves, puisque les enfants avec un Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA) ont déjà à la base un déficit social qui est renforcé par cette ségrégation.
Instaurée souvent dès la petite enfance, cette ségrégation prétérite leur participation à la vie de la collectivité.

➔ Education (art. 23-28-29) :

À Genève, l’instruction publique2 se scinde en deux voies : l’ordinaire3 et le spécialisé4 qui sont régis par des règlements distincts5. La voie ordinaire permet à l’enfant de suivre une scolarité sanctionnée par la reconnaissance de ses acquis via des certificats, diplômes et in fine à l’accès à une profession alors que la voie spécialisée chapeautée par l’Office médico pédagogique (OMP-DIP) ne le permet plus. Une fois dans le spécialisée, l’enfant ne reçoit plus de certification ni de carnet de notes permettant de poursuivre un cursus scolaire hypothéquant ses chances d’accéder aux formations supérieures. Actuellement, un nombre important de familles se tournent vers les écoles privées pour pallier ce manquement de l’instruction publique.

Les enfants avec un TSA n’ont pas facilement accès à l’école publique ordinaire par manque de moyens mis en place (pas assez d’accompagnants et de formation des professionnels au TSA)6 et à cause du système de ségrégation.

Quelques enfants n’ont tout simplement pas eu de place à l’école tout court à la rentrée 2023, forçant leurs parents à arrêter une formation en cours ou à réduire leur taux de travail voire arrêter de travailler pour s’occuper d’eux !

Par ailleurs, l’enseignement dispensé dans les institutions spécialisées ne correspond pas au programme scolaire officiel et trop peu de moyens sont mis en place pour assurer une stimulation adaptée et proposer les apprentissages nécessaires à une future vie d’adultes indépendants. Un avenir basé sur les caractéristiques individuelles des enfants et sur leur différence dès leur tout jeune âge.

Si les parents de Donald Gray Triplett, premier patient de Léo Kanner7, s’en étaient tenus à cela, serait-il devenu un professionnel dans une banque suite à des études secondaires et supérieures ?

Les structures d’accueil dans l’enseignement spécialisé sont diverses et variées, à savoir :
  • les classes intégrées (CLI)
  • les écoles de pédagogie spécialisée (ECPS) et les institutions assimilées
  • les écoles de formation préprofessionnelle (ECFP)
  • les écoles d'orientation et de formation pratique (ECOFP)
  • les enseignants spécialisés et éducateurs détachés8

La nature des classes intégrées et écoles spécialisées, préconisées par beaucoup de professionnels, n’est généralement pas expliquée aux parents
, notamment le fait qu’elles ne proposent pas de programme scolaire officiel, ni de validation des acquis. Alors même qu’ils devraient être des partenaires engagés dans l’éducation de leur enfant, les parents sont dépossédés de leur responsabilité et de la liberté de choix concernant l’orientation de leur enfant, par manque d’information, en contrevenant à l’article 5 de la Convention.

À Genève, le parascolaire est géré par le groupement intercommunal pour l’animation parascolaire9. Ainsi, les enfants scolarisés dans le milieu spécialisé n’ont pour la plupart pas droit au parascolaire. Ceci engendre une grande injustice pour les parents de ces enfants qui doivent s’organiser et doivent très souvent réduire leur taux de travail !

➔ Santé (art. 23-24) :

La détection et le diagnostic précoces de l’autisme (avant l’âge de 2 ans) restent encore insuffisants. Pourtant, il est prouvé qu’avant l’âge de 5 ans, une thérapie intensive permet à l’enfant de développer des compétences qui seront plus difficiles à faire émerger plus tard10.

Une fois le diagnostic posé, une intervention précoce spécifique en autisme n’est pas proposée à tous les enfants, menant à une réelle discrimination dans la différence d’encadrement des enfants en âge préscolaire.

Il y a également un manque de spécialisation à l’autisme dans les disciplines thérapeutiques (ergothérapie, logopédie, psychomotricité, psychologie, pédopsychiatrie, etc.) et d’une manière générale les professionnels formés aux TSA sont rares. Nous recevons toutes les semaines des demandes de parents qui recherchent un spécialiste en autisme pour le suivi de leur enfant et malheureusement les professionnels que nous pouvons recommander sont débordés.

Au niveau de la prise en charge hospitalière, nous constatons fréquemment que les jeunes autistes sont aussi malmenés. Cela est souvent le cas dans le service des urgences aux HUG ou lors d’hospitalisations à plus long terme : le fonctionnement autistique est méconnu du personnel, menant à une surmédication qui non seulement n’aide pas le jeune, mais laisse parfois des traces pour la suite de son parcours.

FACE A CES DISCRIMINATIONS, AUTISME GENEVE SE BAT POUR QUE LES DROITS DES ENFANTS ET ADOLESCENTS AUTISTES SOIENT ENFIN RESPECTES.


Malgré les progrès effectués depuis 2014 et la volonté affichée de l’Etat genevois de mener une politique inclusive, la ségrégation est encore le quotidien de la majorité de ces jeunes.

L’école ordinaire est le milieu social principal durant l’enfance et les compétences cognitives et sociales qu’on y apprend, le tissu social qui se créé, sont d’une richesse inestimable et irremplaçable.

Empêcher des enfants d’accéder à cet environnement stimulant est discriminatoire et nuit à leur bon développement, et cela est d’autant plus grave dans le cas d’enfants autistes, dont l’une des principales difficultés est justement la compréhension des interactions sociales.

Sur la base des articles de la CDE, mais aussi de la CDPH11, Autisme Genève demande que l’Etat de Genève respecte les droits des enfants avec un TSA, en mettant en place l’accompagnement nécessaire afin qu’ils puissent participer pleinement à la vie sociale de notre canton.

Autisme Genève demande la cessation de la ségrégation et la mise en place d’une vraie école inclusive, notamment en s’appuyant sur l’article 24 de la CDPH qui stipule le droit à l’éducation et qui établit que l’éducation doit être inclusive à tous les niveaux.

Avec les moyens dont notre Canton dispose, Genève pourrait devenir un exemple en matière d’inclusion. Cela nécessite une détermination forte sur le plan politique et un grand travail en matière de sensibilisation du grand public. En effet, les personnes autistes, enfants ou adultes ont beaucoup à apporter à notre société mais cela n’est pas possible si on les écarte du monde ordinaire dès leur plus tendre enfance. Nous sommes persuadés que notre Canton a tous les atouts pour créer une société réellement inclusive.

Pour aller plus loin :
1 https://www.unicef.fr/convention-droits-enfants/
2 https://www.ge.ch/document/4742/telecharger
3 https://silgeneve.ch/legis/index.aspx
4 https://www.ge.ch/enseignement-specialise
5 https://silgeneve.ch/legis/index.aspx
6 En contravention au Règlement sur l'intégration des enfants et des jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés (RIJBEP) qui stipule :
Chapitre III : Pédagogie spécialisée,
article 10 : offre Mesures de pédagogie spécialisée en classe ordinaire
7 Médecin qui a été le premier à décrire l’autisme. Le terme « autisme infantile » a été cité pour la première fois en 1943.
8 https://www.ge.ch/enseignement-specialise
9 https://www.giap.ch/parascolaire
10 https://www.autisme.ch/attachments/article/39/Wood.Eliez.2010.02.pdf
11 https://www.edi.admin.ch/edi/fr/home/fachstellen/bfeh/droit/international0/uebereinkommen-der-uno-ueber-die-rechte-von-menschen-mit-behinde.html